30 novembre 2016

J’aime beaucoup le mot bonheur.

Pendant de nombreuses années, le philosophe Paul Ricœur, de tradition protestante, avait l’habitude de venir à Taizé. Il est décédé vendredi 20 mai 2005 à l’âge de 92 ans. Les extraits ci-dessous proviennent d’un entretien lors de son séjour à Taizé pendant la Semaine sainte 2000.

201611291.jpg

J’aime beaucoup le mot bonheur...

Longtemps, j’ai pensé que c’était soit trop facile, soit trop difficile de parler du bonheur.

Et j’ai dépassé cette pudeur. Ou plutôt je l’approfondis, cette pudeur, en face du mot bonheur. Je le prends dans toute la variété de ses significations, y compris celle des Béatitudes. Je dirais que la formule du bonheur c’est : « Heureux celui qui… »

Alors, le bonheur, je le salue comme justement une « re-connaissance », dans les trois sens du mot : je le reconnais comme étant mien, je l’approuve chez autrui, et j’ai de la gratitude pour ce que j’en ai connu, ces petits bonheurs, parmi lesquels ceux de la mémoire, pour me guérir des grands malheurs de l’oubli.

Et c’est là que je fonctionne à la fois comme philosophe, nourri des Grecs, et lecteur de la Bible et de l’Évangile, où on peut suivre le parcours du mot bonheur, mais dans les deux registres. Parce que le meilleur de la philosophie grecque est une réflexion sur le bonheur, le mot grec eudeimon - on a parlé de l’eudémonisme philosophique, chez Platon, chez Aristote -, et je m’y retrouve très bien avec la Bible. Je pense tout d’un coup au début du psaume 4 : « Ah ! Qui nous enseignera le bonheur ? » C’est une question un peu rhétorique, mais qui a sa réponse dans les Béatitudes.

Et les Béatitudes, c’est l’horizon de bonheur d’une vie sous le signe de la bienveillance, parce que le bonheur, ce n’est pas simplement ce que je n’ai pas, ce que j’espère avoir, mais aussi ce que j’ai goûté.

Paul Ricoeur

Voir la vidéo du jour ►   et   notre soleil du jour


avent.jpg

29 novembre 2016

Née par hasard...

 20161128.jpg

Je suis juste née par hasard
Un jour de grande pauvreté
Dans un pays en guerre
Je n'ai jamais vu le sourire de ma mère
Ni même connu mon père.

Je suis né en prison
J'ai oublié pour quelle raison
Je n'ai pas connu le sein maternel
On me l'a très vite enlevé
Et cette femme qu'on disait ma mère
N'a pas supporté, elle s'est suicidée

Je suis née dans un sous-sol
Avec les souris à même le sol
Je n'aurai pas dû exister
Ma vie est une illégalité
Je n'ai pas de maison ni de nationalité

Je suis née en Afrique
J'ai une autre couleur de peau
Je croyais que tout le monde était comme moi
J'ai souvent eu faim et soif
Mais je n'ai rien dit je n'avais pas le choix

Je suis né on ne sait pas pourquoi
Sans amour sans foi ni loi
Des coups j'en ai ramassé des centaines de fois
Et je n'ai jamais compris pourquoi
La peur au ventre j'ai tout accepté
Contre un espoir d'amour et d'amitié
Mais ce fut toujours en vain

Je suis née dans un camp de réfugiés
A Podujevo, dans un pays étranger
Derrière de hauts barbelés
Et devant de lumineux miradors
Avec toujours des hommes armés
Un jour j'ai pris le convoi de la liberté
Pour une terre d'accueil et d'amitié

Et j'ai compris que dès la naissance
Nous n'avions pas les mêmes chances....

Mira Kuraj
04/2011

Voir la vidéo du jour ►   et   notre soleil du jour


avent.jpg

28 novembre 2016

J’ai regardé le monde, j’ai regardé les hommes

20161022.jpg


J’ai regardé le monde, j’ai regardé les hommes,
J’ai vu la misère des pauvres et j’ai entendu leur silence.
J’ai vu toutes ces filles laides qui ne comptent pour personne.
J’ai vu ces enfants abandonnés par leurs parents.
J’ai vu les hôpitaux et les cimetières.
J’ai vu la masse des opprimés, ceux qu’on rejette, ceux qu’on méprise,
tous ceux qui travaillent sans avoir un mot à dire,
sans avoir une responsabilité à prendre.
J’ai vu tous ceux qui n’ont pas le bras assez long pour défendre leurs droits.
J’ai vu ceux qui ont faim et soif de justice,
J’ai vu la foule des meurtris et des résignés.
J’ai aussi vu les guerres et le sang versé.
J’ai entendu le cri des pauvres, le silence des abandonnés et la colère des jeunes.
Et j’ai senti que c’étaient ton silence et ta colère,
Car tu es père et ce sont tes propres enfants qu’on meurtrit et qu’on humilie.
C’est toi qu’on rejette et qu’on bafoue.
Et j’ai perçu, dans le silence des petits et dans leur colère,
J’ai perçu ton appel, discret et insistant : « Viens et vois. »

(source PSN - Novembre 2016)

Voir la vidéo du jour ►   et   notre soleil du jour


avent.jpg

 

Publié dans Général | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer | |

27 novembre 2016

Vierge de l’attente

20161126.jpg


Sainte Marie, vierge de l’attente,
donne-nous de ton huile,
parce que nos lampes s’éteignent.
Vois : nos réserves se sont consumées.
Ne nous envoie pas chez d’autres marchands.
Allume à nouveau dans nos âmes les anciennes ardeurs
qui nous brûlaient de l’intérieur,
quand il suffisait d’un rien pour nous faire tressaillir de joie :
l’arrivée d’un ami lointain,
le rouge du soir après l’orage,
le crépitement de la bûche
qui en hiver surveillait les retours à la maison,
le son des cloches carillonnant les jours de fête,
l’arrivée des hirondelles au printemps,
l’arrondi tendre et mystérieux du ventre maternel,
le parfum de lavande qui faisait irruption quand on préparait un berceau.

Si aujourd’hui nous ne savons plus attendre,
c’est parce que nous sommes à court d’espérance.
Ses sources se sont asséchées.
Nous souffrons d’une crise profonde du désir.
Et, désormais satisfaits des mille succédanés qui nous assaillent,
nous risquons de ne plus rien attendre,
pas même ces promesses surnaturelles
qui ont été signées avec le Sang du Dieu de l’Alliance.

Sainte Marie, femme de l’attente,
soulage la douleur des mères souffrant pour leurs fils qui,
sortis un jour de la maison, n’y sont jamais revenus,
tués dans un accident ou séduits par les appels de la jungle ;
dispersés par la fureur de la guerre
ou aspirés par le tourbillon des passions ;
engloutis par la fureur de l’océan ou bouleversés
par les tempêtes de la vie.

Sainte Marie, vierge de l'attente,
donne-nous une âme de veilleur.
Arrivés au seuil du troisième millénaire,
nous nous sentons malheureusement plutôt fils du crépuscule
que prophètes de l'Avent.

Sentinelle du matin,
réveille dans nos cœurs la passion de fraîches nouvelles
à porter à un monde qui se sent déjà vieux.
Apporte-nous enfin la harpe et la cithare,
afin qu'avec toi, matinale,
nous puissions réveiller l'aurore.

Face aux changements qui secouent l'histoire,
donne-nous de sentir sur notre peau les frissons des commencements.
Fais-nous comprendre qu'il ne suffit pas d'accueillir :
il faut attendre.
Accueillir est parfois un signe de résignation.
Attendre est toujours un signe d'espérance.
Rends-nous pour cela ministres de l'attente.
Quand le Seigneur viendra, ô Vierge de l'Avent,
qu'il nous surprenne, 
grâce à ta complicité maternelle,
la lampe à la main.

Mgr Tonino Bello

Voir la vidéo du jour ►   et   notre soleil du jour

 

Aller de l'Avent !  ... pour faire jaillir en nous le désir de Dieu.
Notre espace pour vivre et pour animer cette attente en suivant ce lien ►

(calendrier, textes, prières, chants, et plus encore, pour les grands et pour les petits...)


avent.jpg

 

Publié dans Avent | Commentaires (1) |  Facebook | |  Imprimer | |

26 novembre 2016

S’il ne naît pas en toi…

Demain, l'Avent...

20161124.jpg


Si l’enfant-Dieu ne naît pas en toi,
alors gueuletonne, bois jusqu'à plus soif.
Noël ne sera qu’une fête conviviale
dont tu auras manqué le mystère.

S’il ne naît pas en toi…
tu laisseras agir tes gosses au gré de leurs instincts
et tu les aideras à grandir dans toutes les disciplines
sauf l’essentiel.

S’il ne naît pas en toi…
tes mômes ne sauront jamais le sens à donner à leur vie.
Le mystère de l’arrivée sur terre d’un Bébé
venu nous dire que seul l’amour compte
donne une puissance vitale
qui transforme et dynamise une existence.

S’il ne naît pas en toi…
alors tu vas surgâter tes gosses
en refusant de les faire communier
à la misère des milliers de jeunes de leur âge
qui vivent des calvaires atroces,
en Afrique et partout dans le monde.

S’il ne naît pas en toi…
la religion que tu véhicules à travers ta phrase rituelle :
"je suis croyant, pas pratiquant"
ne sera qu’un paravent religieux dérisoire
qui te privera d’une force incalculable.

S’il ne naît pas en toi…
prépare-toi à un beau Noël païen
où tu réjouiras seulement ton estomac,
laissant vide ton âme.

S’il ne naît pas en toi…
ce Bébé
qui a pris d’avance la dernière place
n’aura rien à te dire.

S’il ne naît pas en toi…
tu peux au moins l’implorer
devant chaque crèche que tu apercevras en lui disant :
"dis-moi pourquoi tu es si grand et si fragile à la fois" ;

S’il ne naît pas encore en toi...
ne soit pas impatient.
Dieu nous atteint tous et toutes,
sur terre, sans exception.
Seulement il nous attend à son heure.

Si tu essaies d’éveiller ou de réveiller en toi
ce mystère de la naissance de l’Enfant-Dieu,
tu te donnes toutes les chances
pour un Noël de partage et de tolérance,
à la force irrésistible.

Elle ne te quittera plus, cette force,
si, partant d’une naissance prodigieuse,
tu chemines durant l’année sur la route des mystères
de la souffrance et de la mort du Christ.

Il te donnera alors une gueule de ressuscité."

Guy Gilbert

Voir la vidéo du jour ►   et   notre soleil du jour

Publié dans Général | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer | |