L'ESPRIT SALÉSIEN ET LA MISSION   


Dans le R.V.A.,vous connaissez la Parole de Dieu mise en exergue au chapitre sur l'engagement apostolique..

«  Vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde » Mathieu V, 13-16

Dans son livre « le message de Jésus », le Père Varillon, Jésuite Lyonnais de grand renom, souligne que la traduction exacte serait : « C'est vous qui êtes le sel de la terre, c'est vous qui êtes la lumière du monde…. » L'accent est très fort. Et dans un autre passage de l'Evangile (Jean VII-12), Jésus nous dit : « Je suis la lumière du monde »..

Alors quoi ? continue-t-il, c'est Lui ? c'est nous ?..Il dit « Je suis la lumière du monde » et « c'est vous qui êtes la lumière du monde » et au prologue de St. Jean, parlant du Christ, il est dit « Il était la vraie lumière » (Jean 1-9)

Tout cela, continue le Père Varillon, veut dire simplement que nous ne sommes la lumière du monde que si nous sommes identifiés au Christ.. La lumière, c'est Lui et c'est nous.. C'est nous dans la mesure où nous sommes ses disciples - rappelons-nous ce que nous avons dit en début d'après-midi, c'est nous, dans la mesure où nous essayons de vivre l'idéal évangélique, la spiritualité de communion.

Et le sel ?.. Le sel purifie, le sel conserve, le sel donne du goût…

« Si le sel s'affadit, dit Jésus, il n'est plus bon à rien qu'à être jeté dehors et foulé aux pieds par les gens » ( Matth. V-13) C'est un verset tragique..

Le prêtre qui n'est pas vraiment prêtre, la religieuse qui n'est pas vraiment religieuse, le coop. qui n'est pas vraiment coopérateur(trice)le chrétien qui n'est pas vraiment évangélique…. non seulement cessent d'être ce qu'il y a de meilleur, mais deviennent ce qu'il y a de pire.. C'est le sel « affadi » que l'on foule aux pieds…Il n'est plus bon à rien….

Être missionnaire, c'est être d'abord ce que nous sommes, être pleinement ce que nous sommes… pour vivre et travailler. Ces trois verbes s'interpénètrent vraiment.

Matthieu continue en exergue du chapitre II du R.V.A. « Que votre lumière brille aux yeux des hommes pour qu'en voyant le bien que vous faites, ils rendent gloire à votre Père qui est aux cieux.. »

Être pleinement Coopérateur

Art. 3 Le Coop. est un catholique qui vit sa foi en s'inspirant, à l'intérieur même de sa condition séculière, du projet apostolique de Don Bosco :

- il s'engage dans la même mission auprès de la jeunesse et du peuple, sous une forme associée et fraternelle ,
- il vit en communion avec les autres membres de la famille salésienne ;
- il travaille pour le bien de l'Eglise et de la société….
Tout cela d'une manière adaptée à sa condition et à ses possibilités réelles.

Le Coop. est un chrétien qui vit sa foi en s'inspirant du projet de Don Bosco . Le projet de Don Bosco et celui de Marie-Dominique M. était  « le salut des jeunes ».. Nous dirions aujourd'hui que les jeunes découvrent l'amour dont Dieu les aime et répondent à cet amour.

En d'autres mots, aider les jeunes à devenir de bons chrétiens et d'honnêtes citoyens….Pour cela, nos fondateurs ont fait preuve de créativité, d'inventivité. Je rapporterai simplement un fait tout simple de la vie de Marie-Dominique qui est peut-être moins connue parmi nous.

Dès sa jeunesse, Marie-Dominique comprit intuitivement dans l'Esprit-Saint ce que Don Bosco formulera de la manière suivante : « il faut aimer ce qu'aiment les jeunes pour qu'eux-mêmes viennent à aimer ce que nous leur proposons ».

C'est ainsi qu'à l'époque du Carnaval, elle organisait les choses de telle sorte que les jeunes filles de Mornèse puissent s'amuser comme les autres et même mieux, mais sans glisser dans quoi que ce soit d'équivoque et de dangereux pour l'âme…Elle les réunissait, elles dansaient, chantaient… Il est sûr que les organisateurs du bal public ne pouvaient pardonner à Marie-Dominique cette entrave à leurs plans et à leurs recettes. Les jeunes gens se mirent d'accord entre eux, attendaient les jeunes filles à la sortie, avec de bonnes manières d'abord, avec des menaces ensuite…. Les filles tinrent bon et racontèrent tout cela à Marie-Dominique qui les encouragea à ne pas se soucier de leurs menaces et à continuer leur route sans tenir compte de ce qu'on leur disait… Leur cran ne se démentit pas. Marie Do renforça la résistance en leur promettant de joyeux goûters champêtres. Ce qu'elle fit.

Ce petit fait nous montre combien un cœur aimant le Seigneur, aimant les jeunes devient inventif et ne craint pas de se risquer sachant les critiques et malveillances qu'il peut s'attirer.

Je soulignerais aussi l'audace des premiers (res) missionnaires.
Dès le début de nos deux Congrégations, de St. François de Sales et l'Institut des F.M.A., l'audace missionnaire a été des premiers temps.

Quand je pense aux premières Sœurs qui sont parties en mission au tout début de la Congrégation, elles avaient ,certaines, entre 18 et 23 ans, et partaient pour cette terre lointaine du Sud de l'Amérique : la Patagonie. Elles partaient vers des terres totalement inconnues. Aujourd'hui, il nous faut encore avancer sur des terrains également inconnus. Les actes du Congrès de Séville à l'article 3 vous invitent à appréhender les réalités spécifiques culturelles, politiques, associatives de votre environnement.

Dans sa conférence à Lyon en février dernier, conférence qui s'adressait aux religieux(ses) laïcs, Coopérateurs, collaborateurs, anciens, amis de la Famille Salésienne, notre Supérieure Générale Mère Antonia indiquait trois pistes sur lesquelles il fallait se risquer aujourd'hui :
- éduquer à la valeur de la vie
- éduquer à vivre ensemble
- éduquer à la solidarité et au service.

a) - Eduquer à la valeur de la vie :

Nous savons malheureusement, pour combien, sous de multiples formes, la vie est bafouée, détruite, brisée aujourd'hui… Il ne nous faut pas fermer les yeux devant les multiples atteintes à cette vie. Chacun, chacune à notre place nous pouvons faire quelque chose. Mère Térèsa disait : « Oui, ce n'est qu'une goutte d'eau mais l'océan n'est fait que d'une multitude de gouttes d'eau »

Vous savez sans doute qui, dans notre monde, est le plus souvent maltraité, méprisé, compté pour rien , voire vendu ?…. Ce sont les filles et les femmes.

70% des illétrés dans le monde sont des femmes. Les femmes représentent les 2/3 des 1 milliard 200 millions de personnes vivant avec moins de 2 Euros par jour. Dans tous les endroits de pauvreté où les Sœurs travaillent, elles se rendent très bien compte de cela et nous savons que l'illétrisme est la porte ouverte à toutes sortes d'autres grandes pauvretés et.. particulièrement à la traite des femmes, des fillettes qui est un vaste problème totalement indigne de la condition humaine.

Chaque année, de 700.000 à 2 millions de personnes sont vendues !…

La majeure partie des victimes viennent de l'Asie, du Sud-Est Asiatique mais aussi de l'ex Union Soviétique qui semble devenir une source nouvelle ainsi que l'Europe de l'Est, l'Amérique latine, l'Afrique…

Certes, nous nous sentons quelque part impuissants devant ce vaste trafic mais sans doute avons-nous le devoir, au moins, d'avoir les yeux ouverts. Je lisais dernièrement :

Quand Ngun Chaï a vendu sa fille de 13 ans (à la prostitution) pour le prix d'un téléviseur, il a seulement regretté de ne pas avoir obtenu plus d'argent dans cet échange (sa fille contre le poste de télévision). Puis la mère a découvert que sa fille ne travaillait pas, comme le lui avait assuré l'acheteur, dans la cité voisine. En réalité, sa fille était contrainte de vendre son corps dans une « maison close » de Bangkok ayant jusqu'à huit clients par jour ( beaucoup de touristes sexuels provenant d'Amérique, d'Europe, d'Australie). La maman a pleuré. Mais les larmes cependant, n'étaient pas pour sa fille. « Tu aurais dû la vendre pour 159 livres sterling a affirmé la maman et non pour 79, cette personne nous a trompés »…

Cette histoire, tristement vraie, nous est relatée par un groupe de religieuses, un groupe international de religieuses de diverses Congrégations qui oeuvrent activement contre ce fléau qu'est le trafic des femmes et des enfants. Une Sœur Salésienne, Sr Bernadette Sangma est très active dans ce groupe..

Eduquer à la valeur de la vie est urgent même dans notre pays où nous vivons dans un contexte différent mais où la loi de la consommation, du plaisir, de la jouissance appauvrissent et faussent le sens de la vie. Nous assistons à une conception réductive de l'amour et de la famille qui se répercute sur les enfants et sur la société.

En tant que fils et filles de Don Bosco, nous n'avons pas le droit de rester indifférents aux millions de personnes qui, dans le monde, manquent du minimum vital, à la multitude des enfants et des jeunes qui meurent chaque jour ou qui sont vendus par manque de moyens pour se nourrir, pour se soigner, à l'immense peuple d'enfants et surtout de fillettes qui ne peuvent bénéficier de l'éducation, qui ne sont pas alphabétisés par manque de moyens financiers, manque d'enseignants formés, manque de structures etc… et qui deviennent des proies faciles pour ce trafic. Non, nous ne pouvons rester insensibles. Quand Don Bosco et Marie-Dominique ont envoyé les premiers (res) missionnaires en Amérique, ils étaient pauvres en moyens financiers, en personnel, en expérience… Ils ont risqué et ont fait des merveilles…
b) - Eduquer à vivre ensemble

La vie, l'éducation salésienne est fortement centrée sur la relation et aujourd'hui nous sentons combien l'individualisme est développé et même continue de se développer malgré et, je dirais presque, grâce, aux moyens de communication actuels : portables, internet, courrier électronique… qui mettent en communication certes et qui sont un merveilleux outil, mais n'apprennent pas vraiment à vivre ensemble..

L'article 6 des actes du Congrès de Séville vous invite à approfondir la dimension communautaire de l'action apostolique.

Là aussi, je reprendrai les paroles de Mère Générale à Lyon « Eduquer à vivre ensemble, représente un défi pour la qualité de la vie dans l'avenir et même pour la survivance humaine. Il est opportun de ré-assumer la pédagogie de « se sentir aimé » mise en pratique par Don Bosco. L'école , l'oratoire, les espaces de vie des garçons et des filles et la rue elle-même peuvent devenir aujourd'hui des laboratoires pour l'apprentissage du « vivre ensemble ». Bien accompagnés, les jeunes peuvent s'entraîner à la compréhension mutuelle, à la gestion et au dépassement des conflits, à l'accueil de la diversité, jusqu'au dialogue interculturel qui porte à reconnaître les valeurs et les limites de chaque culture y compris de la sienne propre »

L'éducation à vivre ensemble commence en famille. Combien de jeunes aujourd'hui n'ont pas la joie de partager les repas en famille mais chacun vient se servir dans le réfrigérateur à l'heure qui lui convient et prendre ce qui lui plaît… Ainsi, dès le jeune âge se développe l'individualisme. A table, en famille, beaucoup de valeurs s'apprennent : une attention à l'autre, un respect de l'autre, un respect des horaires, une certaine convivialité, le dialogue… etc..

Dans la mesure où nous devenons nous-mêmes des êtres de relation, nous contribuons à l'humanisation de la culture et nous créons un terrain favorable pour la croissance des enfants, des jeunes et mettons dans leurs mains et dans leur cœur les clefs d'une société où pourront se tisser des liens.

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Le cœur à l'ouvrage  La joie de naître  L'esprit salésien et la communion des frères 
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