Une pédagogie de la Visitation.

 

 

Voici, à partir de dépositions au procès de canonisation rapportées en EA T23, p275, des témoignages de Georges Rolland et Michel Favre …

 

« En 1603, Fr. de Sales prescrit l’enseignement du catéchisme dans tout son diocèse. Ce seront des classes du dimanche.

A Annecy, à l’église St Dominique (actuellement église St Maurice), François fera lui-même le catéchisme, seul pendant quelques années. Il quittait même parfois le dîner à demi terminé pour être à l’heure assignée. Les petits enfants venaient de plus en plus nombreux mais … aussi des adultes de toutes conditions. Peu à peu, il fallut à Annecy établir trois classes : pour les plus jeunes et pour les plus avancés. François fit appel aux chanoines, puis à d’autres, pour assumer cette formation avec lui. Il est dit qu’il composait lui-même et distribuait des billets pour faciliter ce qu’il fallait apprendre (ce qui suppose d’ailleurs que ces écoles du dimanche était aussi des lieux où on apprenait à lire !). … Avant d’interroger les enfants,  il les nommait tous par leur nom comme s’il en eut le rôle entre les mains. Notamment les petits allaient tressaillant de joie, répondaient à qui mieux mieux les uns les autres. »

 

François de Sales pratiquait une pédagogie de contact personnel, de confiance aux collaborateurs, une pédagogie de l’encouragement.

 

Privilégie le contact personnel ; établis un contact personnel avec les personnes auxquelles tu t’adresses, avec lesquelles tu travailles. Personne n’est un numéro dans une suite anonyme ! Tu veux que les personnes se parlent, se disent bonjour, commence toi-même.

 

Multiplie les expériences de socialisation : appuie-toi sur des collaborateurs, passe des relais. Ne fais pas tout toi-même : fais confiance à d’autres.

 

Remarquons encore que le langage simple utilisé par François convenait aux adultes. En effet, la simplicité touche chacun et demande de la part du formateur une bonne connaissance du sujet qu’il traite et des personnes auxquelles il s’adresse.

 

Donner correctement notre oui à ce qui nous est demandé.

Accomplir soigneusement et rigoureusement les tâches qui nous incombent et se fier à la Providence.

 

« Le soin et la diligence 11 que nous devons avoir en nos affaires sont choses bien différentes de la sollicitude 12, souci et empressement. …
Soyez donc soigneuse et diligente en toutes les affaires que vous aurez en charge, ma Philothée, car Dieu vous les ayant confiées veut que vous en ayez grand soin ; mais s’il est possible, n’en soyez en sollicitude et souci, c’est-à-dire, ne les entreprenez pas avec inquiétude, anxiété et ardeur. Ne vous empressez point à la besogne :car toute sorte d’empressement trouble la raison et le jugement, et nous empêche même de bien faire la chose à laquelle
nous nous empressons.

Les bourdons font plus de bruit et sont bien plus empresses que les abeilles, mais ils ne font sinon la cire et non point de miel : ainsi ceux qui s’empressent d’un souci cuisant et d’une sollicitude bruyante, ne font jamais ni beaucoup ni bien. Les mouches ne nous inquiètent pas par leur effort, mais par la multitude : ainsi les grandes affaires ne nous troublent pas tant comme les menues, quand elles sont en grand nombre. Recevez donc les affaires qui vous arriveront, en paix, et tâchez de les faire par ordre l’une après l’autre ; car si vous les voulez faire tout à coup en désordre, vous ferez des efforts qui vous fouleront et alanguiront votre esprit, et pour l’ordinaire vous demeurerez accablée sous la presse et sans effet.

Et en toutes vos affaires, appuyez-vous totalement sur la providence de Dieu par laquelle seule tous vos desseins doivent réussir ; travaillez néanmoins de votre côté tout doucement pour coopérer avec elle, et croyez que si vous vous êtes bien confiée en Dieu, le succès qui vous arrivera sera toujours le plus profitable pour vous, soit qu’il vous semble bon ou mauvais selon votre jugement particulier.

Faites comme les petits enfants, qui de l’une des mains se tiennent à leur père, et de l’autre cueillent des fraises ou des mûres le long des haies ; car de même, a      massant et maniant les biens de ce monde de l’une de vos mains, tenez toujours de l’autre main la main du Père céleste, vous retournant de temps en temps à lui, pour voir s’il a agréable votre ménage ou vos occupations. Et gardez bien sur toutes choses de quitter sa main et sa protection,, pensant d’amasser ou recueillir davantage car s’il vous abandonne, vous ne ferez point de pas sans donner du nez en terre. Je veux dire que, quand vous serez parmi les affaires et occupations communes, qui ne requièrent pas une attention si forte et si pressante, vous regardiez plus Dieu que les affaires ; et quand les affaires sont de si grande importance qu’elles requièrent toute votre attention pour être bien faites, de temps en temps vous regarderez à Dieu, comme font ceux qui naviguent en mer, lesquels, pour aller à la terre qu’ils désirent, regardent plus en haut au ciel que non pas en bas où ils voguent. Ainsi Dieu travaillera avec vous, en vous et pour vous, et votre travail sera suivi de consolation. »

IVD 3ème partie ch 10. « Qu’il faut traiter des affaires avec soin et sans empressement  ni souci. »

 

«  … il ne faut rien oublier de tout ce qui est requis pour faire bien réussir les entreprises que Dieu nous met en main, mais à la charge que si l’événement est contraire, nous le recevrons doucement et tranquillement ; car nous avons commandement d’avoir un grand soin des choses qui regardent la gloire de Dieu et qui sont en notre charge, mais nous ne sommes pas obligés ni chargés de l’événement, car ce n’est pas en notre pouvoir … c’est à nous de bien planter et bien arroser ; mais de donner l’accroissement, cela n’appartient qu’à Dieu »

«  … Le laboureur ne sera jamais tancé s’il n’a pas belle cueillette, mais oui bien s’il n’a pas bien labouré. » TAD livre 9, ch 6 et 7.

 

 

Etablir des liens de réciprocité.

 

François de Sales a eu des contacts suivis avec des personnes de toutes conditions, homme et femmes. Il a connu des amitiés profondes qui l’ont marqué, façonné et sans lesquelles il ne serait pas devenu ce qu’il est devenu et n’aurait pas accompli ce qu’il a accompli.

A l’image de Dieu Trinité, nous sommes créés pour l’Union, union à Dieu, aux autres et à nous-mêmes. Créés pour la COMMUNICATION. L’amitié en est le modèle (cf. IVD, 3ème partie, ch. 17) :

· amour et amour mutuel,

· connu des partenaires,

· relation où la communication (mise en commun) des biens est le fondement de cette amitié. La qualité d’une amitié tient à la qualité de ce qui se communique.

 

«  … Et c’est une bonne partie de ce que je te communique maintenant que je dois à cette communauté du monastère de la Visitation, parce que celle qui en est la responsable (Jeanne de Chantal), sachant que j’écrivais sur ce sujet, et qu’il me serait malaisé d’y travailler assidûment si Dieu ne m’aidait fort spécialement, … elle a eu un soin continuel de prier et de faire prier pour cela et de me conjurer sainement de recueillir tous les petits morceaux de loisir (tous les petits instant) qu’elle estimait pouvoir être sauvés par-ci par-là de la presse de mes occupations. Et parce que cette âme m’est en la considération que Dieu sait, elle n’a pas eu peu de pouvoir pour animer la mienne en cette occasion. …

(Préface du TAD : A Annecy, le jour des très amants apôtres saint Pierre et saint Paul, 1616) »

 

François sait, reconnaît et apprécie ce qu’il doit à ses amis, ce qu’il en reçoit, il sait aussi que les échanges sont précieux à l’un et l’autre. Quelle largeur de cœur !

 

Présente-toi comme instrument, intermédiaire de l’apprentissage et non comme le centre ; tu es au service des autres dans leur formation, tu n’en es pas l’artisan principal. Donne la parole, favorise les initiatives de tes collaborateurs, de tes collègues, de tes étudiants, des patients qui viennent vers toi. Accepte de recevoir !

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« Dieu est Dieu du cœur humain »               Un essai de pédagogie salésienne.

 

La pédagogie est affaire de cœur, d’action, de liberté, de compétence professionnelle.    J. Harvengt